Ces petits établissements à l’image de La Grande Maison

Par Mansour M’henni
Ces derniers jours, un jeune établissement universitaire a connu des mouvements de contestation qui ont failli retarder les dates du déroulement des examens.

J’ai voulu en parler d’abord parce que ce n’est pas le seul cas de figure et que son cas peut informer d’un état d’esprit qui s’empare de nos sentiments au point, parfois, d’obstruer toute visibilité claire et tout discernement devant notre raison. J’ai voulu en parler aussi parce que c’est un institut qui m’est cher, un peu comme un enfant, puisque j’ai été son premier directeur, à sa création dans des conditions difficiles, surtout qu’il était (il est encore) le seul établissement universitaire de la ville. La contestation a éclaté sur la base d’une information non vérifiée selon laquelle le ministère de l’Enseignement supérieur aurait l’intention de fermer l’institut et donc de répartir les gens qui y travaillent dans d’autres établissements, loin de leurs domiciles respectifs. Au départ, ce fut aux ouvriers de bouger, puis les étudiants, puis une violence verbale, parfois débordante, touchant même les enseignants et le directeur qui choisit tout bonnement de présenter sa démission (non encore acceptée). La situation s’est tellement tendue que le syndicat local a dû s’en mêler, et non toujours dans le sens de la modération. Le sous-directeur dut gérer cette situation inattendue, à la veille des examens, en coordination et avec la participation de l’université (le président et ses adjoints), et l’on a fini par trouver le bout du fil et engager un début de résolution du problème. La raison finissant par prendre le dessus, le cours des choses a repris son déroulement normal, mais des conversations franches et sereines avec tous les partenaires devra reprendre, plus tard, à la fois pour s’accorder sur les modes de tractation et même de contestation, mais aussi pour comprendre ensemble les tenants et les aboutissants de ces événements qui se déclenchent pour un oui ou pour un non, jamais dans l’intérêt systématique de l’ensemble. Tout a commencé, semble-t-il, à la suite d’une correspondance des plus normales et des plus accoutumées, à la fin de chaque année, demandant aux établissements leurs estimations respectives quant au nombre de nouveaux bacheliers qu’ils pourraient accueillir pour la prochaine rentrée universitaire. Et c’est autour de cette correspondance qu’a été monté tout un scénario fictif de tendance à la fermeture de l’institut par réduction progressive, chaque année, des étudiants qui y seraient orientés. Au fait, est-ce vraiment facile, et est-ce même raisonnable, de penser à fermer un établissement universitaire une fois édifié sur le temps et avec les moyens qu’il a fallu pour le faire ? Je crois pouvoir dire que ce serait de l’ordre de l’absurdité que d’y penser, ce qui devrait rassurer les ouvriers et les fonctionnaires de l’institut en question et de tous les instituts de même nature, ainsi que les citoyens qui ont le plein droit de tirer un fierté certaine de l’existence de ces lieux du savoir sur leur territoire. Cependant, cette donnée de base n’exclurait pas les réformes et les transformations qui donneraient à ces établissements en place, l’efficience requise conformément aux objectifs convoités. Un établissement, universitaire ou non, qui ne sait pas s’adapter au contexte général et à son environnement propre finit par devenir contreproductif. Toute entreprise aussi. En effet, la création d’un établissement universitaire est toujours dictée par des besoins objectifs, à la croisée des deux dynamiques de développement, la régionale et la nationale. Et puisque ces données sont elles-mêmes variables, on pense toujours à adapter les établissements à cette variation des données, sans pour autant recourir à la décision radicale de leur fermeture. Tout est dans l’état d’esprit à adopter, en adéquation avec le monde moderne, de façon à comprendre que l’on puisse obtenir un diplôme et se trouver, peu d’année après, contraint à une mise à niveau professionnelle exigeant d’autres compétences et un autre savoir-faire non programmé dans la formation initiale. Nous sommes dans un monde où celui qui ne se meut ni ne se transforme risque d’être propulsé par la machine de la vie qui verrait en lui un objet inopportun sur son chemin. C’est en cela que le cas de l’institut ci-dessus évoqué peut constituer comme un vrai miroir de la Grande Maison Tunisie où, de plus en plus, certains actes contestataires se déclenchent et évoluent jusqu’à la violence pour des motifs vraiment fallacieux ou par insuffisance d’information et de prospection, quand ce n’est pas carrément pour de mauvaises intentions. Je ris ici au souvenir des composantes de la société civile d’une ville qui a cherché, dernièrement, à bloquer la dynamique vitale pour exiger la construction d’un téléphérique !!! Voilà où en est la Tunisie d’aujourd’hui ! Et l’on s’étonne que notre économie soit au plus bas et que notre pays soit au bord du précipice !