De la réhabilitation de la diplomatie tunisienne
Par Mansour M’henni
Force est de reconnaître que la diplomatie a été l’un des points forts de la politique tunisienne depuis l’indépendance du pays. Elle a été marquée par des figures notables, souvent des hommes d’une culture certaine, qui ont allié la maîtrise des dossiers et l’intelligence des enjeux à un savoir être et un savoir faire qui ne laissaient pas leurs interlocuteurs indifférents, avantageusement s’entend.
Il y a eu Habib Bourguiba dont certains disaient qu’il était le meilleur diplomate de son temps et qui, de ce fait peut-être, savait choisir les représentants de son pays dans le concert international. Il a d’ailleurs cumulé ce poste avec celui de la défense et celui de Premier ministre, jusqu’à la proclamation de la République, quand il a été investi de sa présidence. Retenons au moins, de l’âge d’or de la diplomatie tunisienne, des noms comme celui de Mongi Slim, Habib Bourguiba Jr., Mohamed Masmoudi, Béji Caïd Essebsi, Habib Boularès, et d’autres encore.
Aujourd’hui, des suites d’une déstabilisation inquiétante de la diplomatie tunisienne après janvier 2011, un effort est déployé pour lui faire retrouver ses bons repères et pour la remettre sur les rails de la juste voie, et de la « juste voix », pour dire comme Gérard Dessons. En bon disciple de Bourguiba, mais aussi en fidèle épigone, le Président Béji Caïd Essebsi, beaucoup plus que le Premier ministre de 2011, qui n’en avait pas les moyens, s’est d’abord appliqué à la réparation des dérapages de certains prédécesseurs impliqués dans le secteur et à l’assainissement des rapports parfois sérieusement affectés par les erreurs du passé.
On se souvient qu’en 2011 il avait négocié avec les « Grandes puissances » des promesses de soutien à la Tunisie dont la plupart n’ont pas donné leurs fruits soit par la compromissions des rapports bilatéraux, soit par une diplomatie d’improvisation, soit aussi par mauvaise gestion, pour ne pas parler, sans preuves, de corruption pourtant manifeste selon certains. Aujourd’hui encore, lors de ses nombreux voyages, il a eu les mêmes objectifs, avec toujours la même démarche. A preuve son dernier voyage aux USA pour une visite de travail qui n’a pas manqué de rétablir notre pays dans son statut respectable et notre diplomatie dans sa dynamique pacifiste, légaliste et rationnelle.
Ce n’est sans doute pas un pur hasard si, parallèlement, l’Union Européenne, par la voix de son parlement, réitère son soutien pour la Tunisie, avec des faveurs décidées, mais mieux encore, elle souligne son intention de reconduire le concept et la dynamique de méditerranéité où notre pays faisait figure de proue et d’acteur efficace et crédible.
De ce point de vue qui, à aucun moment, n’a négligé notre dimension maghrébine d’abord, mais arabe, musulmane et africaine aussi, notre barque semble retrouver ses meilleures voiles. Néanmoins, quelques manipulations idéologiques ne peuvent toujours pas lâcher du lest et continuent de chercher à compromettre tout ce qui leur paraît à même de remettre la machine en marche. Histoire de mettre les bâtons dans les roues de l’adversaire politique même quand son action est d’évidence pour l’intérêt de l’ensemble ? Ce serait dommage car, d’une manière ou d’une autre, nous sommes forcément enrôlés sur la même barque, tous, pour le meilleur et pour le pire !
Une autre logique est nécessaire aujourd’hui pour endiguer les effets de la crise, celle d’un juste milieu qui s’accommode de certaines souplesses en vue d’une participation collective, au-delà de toutes les divergences, à l’effort de redressement de la barre et de la reprise de la navigation dans le sens du développement et du progrès.
