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Chronique03/06/2016 à 14:40

De la valeur profonde du retour de la statue de Bourguiba

De la valeur profonde du retour de la statue de Bourguiba

Par Mansour M’henni 


Le rétablissement de la statue de Bourguiba, dans l’avenue portant son nom et dans un face-à-face symbolique avec la statue d’Ibn Khuldoun, 

devrait être repensé aujourd’hui du point de vue des valeurs profondes de cet acte qu’une vision superficielle des choses a confondu ou cherché à confondre avec le culte de la personnalité et d’autres niaiseries de circonstance et d’opportunisme politique.

Ce n’est sans doute pas ici le lieu de cette pensée, mais une rencontre inopinée, le jour même de la restauration de la statue, le 1er juin 2016, me permet d’évoquer certaines pistes de réflexion à ce propos.  Ce jour-là, j’ai retrouvé M. Mohamed Hédi Bellakhoua, un ancien gouverneur de Béjà (1971-1973), dans le café où nous avions souvent l’occasion de nous retrouver avec d’autres amis pour parler surtout de la Tunisie : celle d’hier et d’aujourd’hui, en rapport avec ce qui pourrait s’esquisser pour son avenir.

Si Hédi était bien sur ses trente et un, car il rentrait de la cérémonie de remise, en juste place et en juste circonstance, de la statue Bourguiba. Il était indigné de certaines attitudes qui faisaient, qui font encore sans doute, du bâtisseur de la Tunisie moderne « un ennemi de l’Islam ». Il a tenu à me rappeler deux actes significatifs du premier Président de la République Tunisienne : « Deux mois seulement après la proclamation de celle-ci, précise-t-il, Bourguiba a ordonné d’enlever deux statues représentatives : celle du cardinal Lavigerie brandissant la croix en face de la mosquée La Zitouna, et celle de Jules Ferry consacrant, au nom de l’école, la supériorité de la civilisation occidentale à la civilisation africaine et justifiant ainsi le colonialisme et l’impérialisme ». Et si Hédi d’ajouter :

« Rien que ces deux actes devraient donner à réfléchir. Quand on connaît les intentions et les motivations profondes de l’un et l’autre, on comprend que ces deux actes restaurent la primauté de l’Islam en terre tunisienne. Quant à ce qui se dit à propos de Ramadan, j’ai été témoin d’une situation où il était souligné que Bourguiba n’invitait du tout pas à abandonner le jeûne, mais qu’il cherchait seulement à insister sur l’importance du travail pour sortir du sous-développement. Je vous raconte une anecdote qui montre encore combien Bourguiba croyait à la prédestination et à la justice supérieure, dans le bon esprit des croyants. Un jour de la visite de Boumedième et du Président, dans la région où j’étais gouverneur, la sécurité algérienne avait donné la consigne de ne pas ouvrir, pendant le défilé, le plafond de la voiture présidentielle pour les salutations de la population par les illustres invités. J’en avais informé le Président. Toutefois, quand on était en voiture, celui-ci ordonna au conducteur de décapoter la voiture et s’adressa à son hôte dans ses termes :

--Je suis au courant, Boumediène, de l’ordre sécuritaire ; mais sache que quand l’heure de quelqu’un arrive, pour passer de vie à trépas, nul ne peut la retarder. Et puis, je n’ai pas fait du mal à mon peuple pour qu’il cherche à me tuer.

--Mais vous, répondit Boumedième, vous êtes le Combattant Suprême, Monsieur le Président ! Quant à nous, nous sommes des soldats et il nous est arrivé de tuer, de beaucoup tuer même. Il est donc normal qu’on cherche à nous tuer. »

Ainsi finit le propos de si Hédi, qui me poussa à revoir ma leçon d’histoire et à me rappeler que Charles Martial Lavigerie, l’archevêque de Carthage (1884), baptisé « chef de la septième croisade », est le fondateur de la Société des missionnaires d'Afrique. Sa statue de Bab El Bhar avait été érigée par Lucien Saint, le résident général de France en Tunisie, en 1925 pour le centenaire du cardinal dont le geste de brandissement de la croix, au regard de tous les croyants et des étudiants qui allaient à la Zitouna, avait été ressenti par ces derniers comme une provocation intolérable. Leur contestation de la statue leur avait même valu des réprimandes et Bourguiba leur donna raison et leur rendit justice trois décennies plus tard.

Je revins aussi à Jules Ferry, auquel il faut reconnaître le mérite de l’appel à l’enseignement gratuit, et je me souvins de sa polémique avec Clémenceau sur les civilisations supérieures et les civilisations inférieures, dans la juste conception de sa statue qui était dans l’avenue Jules Ferry, devenue Avenue Bourguiba. Je me souvins aussi qu’il était derrière le traité du protectorat de la Tunisie en 1881. Au fait, ne disait-il pas : « Il faut dire ouvertement qu’en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures. [...] Je répète qu’il y a pour les races supérieures un droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures. [...] je soutiens que les nations européennes s'acquittent avec largeur, grandeur et honnêteté de ce devoir supérieur de la civilisation. »

On comprend alors le vrai grand mérite de Clémenceau d’avoir mis les points sur le i, à ce propos : « Voilà […] la thèse de M. Ferry et l'on voit le gouvernement français exerçant son droit sur les races inférieures en allant guerroyer contre elles et les convertissant de force aux bienfaits de la civilisation. Races supérieures ! Races inférieures ! C'est bientôt dit. Pour ma part, j'en rabats singulièrement depuis que j'ai vu des savants allemands démontrer scientifiquement que la France devait être vaincue dans la guerre franco-allemande, parce que le Français est d'une race inférieure à l'Allemand. Depuis ce temps, je l'avoue, j'y regarde à deux fois avant de me retourner vers un homme et vers une civilisation et de prononcer : homme ou civilisation inférieure ! (...) ».

Bourguiba, dont la première ligne politique était la généralisation de l’enseignement gratuit dans la Tunisie indépendante, avait bien l’idée de faire de l’école un espace de justice et d’égalité et non un espace de hiérarchie et d’exploitation. C’est pourquoi il a décidé, de façon symbolique, de prendre la place de Ferry et de corriger sa philosophie et inscrivant son nom sur l’espace que le Français dominait et en y nourrissant les valeurs appropriées.

Voilà Bourguiba et sa statue ! La remise en place de celle-ci n’est en fait qu’une justice qui lui est rendue par l’Histoire, dans son intelligence fondamentale, après toutes les tentatives de distorsion et de falsification qu’on a voulu lui imposer. Désormais cette statue sera le livre toujours ouvert dans lequel les générations successives du peuple tunisien trouveront des repères à même d’illuminer leur façon d’édifier l’avenir. 

Economique Jawhara FM

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