L'escalade contre l'état-nation …!


Par Pr. Khalifa Chater
Les risques de partition en Syrie : Définissant récemment, la situation en Syrie, le poète Adonis affirme : "Une révolution doit être indépendante et sans violence, pour enraciner les principes de la démocratie… Ce qui se passe, en Syrie, c'est du massacre" (site la dépeche.fr, 18 juin, 2014). Rejetant la notion de printemps arabe, Adonis déclare : "C'est notre problème actuel dans le monde arabe (...) On insiste sur le changement de régime (...) Mais si on ne change pas la société, on ne change rien (...) On remplace un tyran par un autre tyran". La dérive actuelle de l'insurrection populaire syrienne justifie ses vues, puisque le combat se déroule désormais, sur plusieurs fronts, opposant de nombreux protagonistes (régime contre résistance, mouvements terroristes an-Nosra, contre Da’ech et contre l'armée libre, opposition interne et formations en exil).
La population syrienne est devenue l'otage de tous les acteurs internes et externes, impliqués dans la tragédie. Les populations survivent sous les bombes ou se condamnent à l'émigration. L'équation Assad ou jihadisme ? est tragique. L'attitude cynique des acteurs internationaux et régionaux est en faveur du statu quo, aux dépens de tous les Syriens. Des faits semblent même annoncer que le vent tourne au profit du régime contesté. Que peut-on dire aux survivants de la tragédie ?
Le règne des milices en Libye : Depuis la chute du régime de Kadhafi, le pays ne parvient pas à sortir du chao sécuritaire et politique. Les seigneurs de la guerre sont divisés, par leurs différends tribaux et la concurrence entre leurs chefs. Il en existerait près de 1700 groupes, qui poursuivent des objectifs très différents, divisés sur le plan idéologique. Le général en retraite, Khalifa Haftar, soutenu par la mouvance civile, est à l'assaut des milices islamistes. Prenant l'initiative, leurs milices armées semblent dominer actuellement la scène. Des combats à l'arme lourde ont lieu dans les villes de Benghazi et Tripoli et dans leurs aéroports. Un gigantesque dépôt de gaz et de carburant, partiellement incendié, menace d’exploser non loin de la capitale. Les combats entre milices rivales se sont intensifiés à Benghazi, en Cyrénaïque (Est), ainsi qu'à Tripoli. Ils auraient fait plus de 200morts, selon un dernier bilan officiel. Dans ce pays en décomposition, la population otage tente de chercher refuge dans les pays du voisinage. Signe d'insécurité, les missions diplomatiques ont quitté le pays. La Chambre des représentants, issue des élections du 25 juin a dû tenir sa séance inaugurale à Tobrouk à quelque 1.500 km à l'est de la capitale, vu l'insécurité régnant à Tripoli, suite à l'offensive conduite par des islamistes le 13 juillet et leur entrée en guerre pour la prise de son aéroport, après leur déroute électorale. Mais les élus islamistes et leurs alliés de la ville de Misrata (ouest du pays) ont boycotté la cérémonie la qualifiant d'anticonstitutionnelle, car réunie hors de la capitale. Fait significatif, les protagonistes, pourtant désunis, ont fait valoir une démarcation idéologique, transgressant les positions tribales effectives.
La guerre de Gaza : Elle s'inscrit dans la stratégie israélienne de guerres cycliques, pour mettre en échec toutes velléités de reprises du processus de paix. Face à cette agression, la rue palestinienne est unie. D'ailleurs, les frères ennemis (Hamas et Fath), esquissent un rapprochement contre l'adversaire commun. Ils démentent, dans leur cas, la stratégie d'implosion des Etats-nations. L'attitude différentielle des pays arabes s'explique par l'état des rapports de forces et les préoccupations intérieures. Nous remarquons, cependant, le retour de l'Egypte sur scène et l'offre de sa médiation, ainsi que les consultations entre les puissances régionales et les dirigeants des pays du Golfe. La question palestinienne, qui constitue bel et bien, le conflit matriciel du Moyen-Orient, suscitera, à plus ou moins brève échéance, un réveil salutaire de l'aire arabe et une prise de conscience du défi.



