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Chronique29/06/2014 à 13:57

La campagne des faux dévots contre l’émission de Nizar Chaari sur HannibalTV

La campagne des faux dévots contre l’émission de Nizar Chaari sur HannibalTV

Par Mansour M’henni

J’ai suivi la plupart des réactions qui ont suivi le spot annonce de la nouvelle émission de NizarChaari sur HannibalTV, une émission que d’aucuns ont prise pour une émission religieuse. J’ai été particulièrement scandalisé par certains commentateurs qui sont allés trop vite en besogne pour s’ériger en défenseurs acharnés de l’islam et en dénigreurs du producteur-présentateur qui est alors accusé de tous les vices et de toutes les félonies.

Pauvres gens ! Il est vrai que tout acteurs des médias qu’ils se prétendent, ils n’ont aucun sens des arts qui président à l’efficience de la production dans ce domaine, surtout en matière de marketing. Les pauvres ! Sans le vouloir, ils ont offert le grand buzz à Nizar et à son émission avant même que celle-ci ne commence à être diffusée ! C’est toute la différence entre «  ceux qui savent et ceux qui ne savent pas ».

Toute la différence entre les vrais professionnels qui sont dotés des sens de la créativité et de l’innovation, et les intrus qui, avec des propos de quat’sous, se croient en droit de devenir des législateurs dans tous les domaines de la vie. Il est vrai que notre assemblée constituante a permis à certains de croire que tout est permis, en dehors de tout respect de certaines règles ; mais une fois n’est pas coutume.

On l’a donc compris : dans un geste sans doute humoristique, Nizar s’est affublé d’une barbe qui peut être connotée par certains, d’un chapelet qui nous rappelle certains personnages de la catégorie « Sois pieux et fais ce que tu veux ». Et pour compléter le décor, il s’est fait entourer d’une demi-douzaine de jeunes demoiselles que ses dénigreurs aimeraient bien embobiner dans un jihad pareil à celui que leurs idéologues ont institué en Syrie. Du coup, c’est le scandale pour ceux qui se croyaient heureux de réaliser un but précieux devant des filets vides et qui, une fois la balle dans les bois, ont découvert qu’ils avaient marqué le but contre leur camp.Evidemment, l’objectif de cette chronique n’est pas de défendre NizarChaari, ni la chaîne HannibalTV : ils n’en ont sûrement pas besoin. Le but c’est de mettre en évidence la gravité de ces attitudes qui, pour la moindre créativité artistique, crient au scandale et appellent à l’épuration, ces attitudes auxquelles il faudra s’opposer fermement pour que la culture et les arts demeurent dans notre société comme le principal moteur de l’intelligence et l’heureux ingrédient du civisme éclairé et tolérant.

La Tunisie ne peut pas rebrousser le chemin de l’Histoire ; elle peut juste regarder le passer pour éclairer l’avenir. Là est son vrai combat et elle ne pourra que le gagner, toujours et contre toutes escarmouches.

Mais au fait, poussons le raisonnement plus loin : supposons que NizarChaari, le patron et la tête pensante de Tunivisions, le premier magazine people en Tunisie, veuille faire une émission religieuse ; en quoi cela serait-il à interdire ? N’est-il pas du droit de tout musulman d’exprimer et de présenter sa manière de comprendre et de voir sa religion ? Surtout s’il le fait sans vouloir imposer à quiconque l’obligation de le suivre !

Oui, pourquoi pas une émission sur l’islam populaire, celui que le commun des gens vivent avec une sincère communion spirituelle avec Dieu, sans les intermédiaires parmi lesquels on ne cesse de découvrir de nombreux  falsificateurs ? Un peu dans l’esprit de cette « foi des vieilles » revendiquée par le Grand Omar Ibn Alkhattab : « Allahommaimanan ka iman el-ajaïzi ! ».

Pauvre de nous, en fait, et de notre religion que de nouveaux dictateurs tiennent à façonner à leur guise pour mieux dominer les  gens. « C’est aux vrais dévots », comme dit Molière, aux intellectuels et aux gens du peuple qu’il faut s’adresser pour qu’ils se mettent en chœur à défendre l’esprit de leur religion : celui de l’amour, de la tolérance, de la vie, sur un fond de foi inaliénable en Dieu et son prophète. Bref, Al Ihsanbaad al Iman !

Mais les autres, les faux dévots, ce n’est pas la religion qu’ils servent ou qu’ils défendent, ce ne sont que leurs propres intérêts.

Cela me rappelle le dernier paragraphe de la préface à la pièce de Molière, Tartuffe, violemment attaquée par de faux dévots à sa sortie. Voici ce que Molière en dit, et cela vaut encore aujourd’hui : Huit jours après qu’elle eut été défendue, on représenta devant la Cour une pièce intitulée Scaramouche ermite, et le roi, en sortant, dit au grand prince […] : « je voudrais bien savoir pourquoi les gens qui se scandalisent si fort de la comédie de Molière ne disent mot de celle de Scaramouche » ; à quoi le prince répondit : « La raison de cela, c’est que la comédie de Scaramouche joue le ciel et la religion, dont ces messieurs-là ne se soucient point ; mais celle de Molière les joue eux-mêmes ; c’est ce qu’ils ne peuvent souffrir. »

Economique Jawhara FM

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