Le Patrimoine de Bourguiba pour éclairer le chemin de l’avenir

Par Mansour M’henni

L’Association de Fidélité au Patrimoine du Leader Habib Bourguiba annonce la commémoration de la date du 2 mars 1934, et ce le 2 mars 2016 conformément à un programme réparti entre Monastir et Ksar Hellal. La matinée sera meublée par trois gestes symboliques au Mausolée Bourguiba : le salut au drapeau, la fatiha, et une allocution de circonstance. L’après-midi, une réception est organisée à Dar Ayed (Ksar Hellal).

Selon le texte de « l’invitation honorifique », cette commémoration est organisée en signe de fidélité au rôle historique assumé par la famille destourienne pour la libération de la patrie et pour l’édification de l’Etat moderne. Elle est organisée aussi avec la conviction de la nécessité de regroupement de la famille destourienne pour qu’elle participe efficacement à la sauvegarde de l’unité de la patrie et à son progrès vers le meilleur.

C’est le comité régional de l’association à Monastir qui veille à l’organisation de cette manifestation sous la présidence de Fredj Dghim, qui est l’initiateur de cette association nationale. F. Dghim est un homme d’affaires qui se dit bourguibien de souche et de fidélité inaliénable. Lui, qui est en amitié avec la plupart des sensibilités politiques dans le pays, a la ferme conviction que le patrimoine bourguibien est le seul à même de remettre le pays sur la voie de l’action, du progrès et du vivre-ensemble.

A son avis, cela devrait concerner toutes les orientations politiques, même les plus divergentes et celles qui étaient en opposition à Bourguiba. Il s’agirait pour eux d’accepter l’évidence que le moment bourguibien est fondateur, dans l’Histoire de la Tunisie moderne, malgré ses insuffisances qu’il faut bien s’appliquer à corriger pour aller de l’avant et construire la démocratie sur des bases solides.

C’est d’ailleurs pour cela que son association est nationale, car Bourguiba est bien la propriété de tous les Tunisiens, ceux qui s’en reconnaissent et ceux qui font semblant de l’ignorer ou de l’accepter, à contrecœur et à leur corps défendant.

Selon la même logique, l’avenir de la Tunisie ne pourra se construire sans les destouriens, toutes générations et toutes tendances confondues. De ce fait, deux hypothèses de base : d’abord, l’acceptation de cette vérité par tous les acteurs politiques, ce qui semble se confirmer avec le temps et par une rationalité qui de plus en plus l’emporte sur l’excitation « révolutionniste » ; ensuite la conviction inéluctable des destouriens que leur responsabilité est avant tout celle de leur union, évitant ainsi de faire le jeu de toutes les intentions suspectes et s’impliquant activement dans le seul intérêt de la patrie et de l’ensemble de ses citoyens.

Il faut reconnaître à F. Dghim la noblesse de son intention, mais peut-il y avoir un consensus autour de cette démarche quand nous constatons que dans la plupart des familles politiques, quelles que soient leurs couleurs, c’est le séparatisme qui prévaut et l’égocentrisme qui domine, le plus souvent par excès d’égoïsme de la part des premiers responsables des partis ? Sans doute est-ce pour cela qu’il a choisi d’initier une association et non un parti, bien qu’ayant soutenu et sympathisé avec plusieurs partis depuis 2011.

Il reste quand même important, pour lui, de travailler à cet effet et de créer, dans son association, un groupe d’influence ou de pression pour orienter l’Histoire dans ce sens. Or, pour ce faire, il nous semble que les cérémonies et les réceptions de commémoration peuvent à peine attirer l’attention sur l’action préconisée. Ce qu’il faudrait surtout, c’est une action en profondeur par la conversation intellectuelle, par la culture la plus étendue, par l’infléchissement de l’éducation à cette démarche, dans la pure démocratie des objets de la connaissance. C’est aussi une interaction concertée, puis partagée, avec les instances politiques et administratives ayant les mêmes objectifs.

Etant donné la délicatesse de l’opération et de certains contentieux qui lui sont encore collés, il importe de préciser qu’il ne s’agit pas d’un nouveau culte de la personne de Bourguiba, quoi que nous en pensions, mais bien d’un important virage historique dont peuvent se reconnaître tous les Tunisiens, dans une unité fondamentale, quelles que soient leurs différences.

Indépendamment du résultat qui couronnera les efforts et les actions de cette nouvelle association, on ne peut que saluer ses intentions et sa contribution à renforcer le tissu de la société civile qui a été, dans les moments difficiles, le principal antidote contre les tentations réactionnaires et extrémistes.