Marine Le Pen et Moncef Marzouki dans la mouvance de leur alliance fondamentale

par Mansour M'henni

A la suite du succès tonitruant de son parti dans les élections européennes, Marine Le Pen a déclaré : Ils sont déçus, ils comptent sur les autres pour assurer leur propre confort social, et ils sont désespérés à cause de leur faiblesse d’esprit. ?Mais c’est ce dernier trait qui les rend si importants à nos yeux. C’est grâce à eux que nous pourrons redresser la France. Grâce à leur détresse et à leur manque de recul ou d’implication politique. A vrai dire, nous ne serions rien sans ces attardés. C’est pour ça que je tiens à remercier les Français les plus faibles psychologiquement d’avoir voté pour nous.

Evidemment, ces propos n’ont pas manqué de susciter des commentaires, les uns y sentant une note de compassion, les autres un ton de mépris. Moi, j’y ai plutôt trouvé une sorte de consonance, pour ne pas parler de convergence des pensées dans le même moule idéologique, entre la présidente du FN en France et le provisoire de président en Tunisie. N’est-ce pas ce dernier qui a traité ses concitoyens (« Son peuple ! », dirait-il) d’ignorants devant de nombreux diplomates africains ? N’est-ce pas lui qui leur sort aujourd’hui des discours véhéments pour les prévenir des malheurs qui s’abattent sur eux et des épreuves qui les attendent dans la lutte qui s’est imposée à eux contre l’intégrisme, oubliant cependant de leur rappeler qu’il a été l’un de ceux qui avaient le plus encouragé ses agents et ses symboles et qui lui avaient préparé le terrain.

Il semble que certains nouveaux dirigeants politiques aient trouvé dans l’humiliation de la foule une raison de propagande politique et un moyen efficace de manipulation électorale. Ils auraient donc choisi de se démarquer de la stratégie de séduction politique fondée sur la caresse dans le sens du poil, pour innover dans le domaine en brutalisant le parterre électoral et en l’insultant pour lui tendre le spectacle de son humiliation, justificatrice de sa soumission et de son allégeance !

La Dame Le Pen, célèbre par sa répulsion des immigrés, voire par leur dédain, semble donc se retrouver sur le même terrain d’action et dans la connivence éthique et stratégique de l’ancien allié francophone reconverti en un chantre de l’arabisation à outrance, comme s’il était dans le regret de sa propre formation et du produit qui en est issu.

Ainsi donc, Madame et Monsieur, dans leur couplepolitique, de mixitébien cohérente cette fois, croisent leurs principes de base :

D’abord s’inscrire dans l’esprit d’exclusion et de ségrégation, à l’égard des petites gens, tout en vantant l’égalitarisme en droits. Ensuite, faire usage d’une arrogance politique sans vergogne, avec la conviction qu’à force de se faire insulter, on finit par se faire accepter. Finalement, tirer profit de ceux considérés comme des bougres et des insuffisants mentaux, en les impressionnant par cette violence de prestance, impassiblement exhibée jusqu’à passer pour une force, afin de les gagner dans les rangs, comme des inconditionnels, par une sorte de sadisme caractérisé répondant à une propension au masochisme, supposée inhérente aux populations « fragiles ».

Aux dernières nouvelles, le parti de Martine Le Pen a ouvert ses laves volcaniques contre les journalistes, «ces connards de journalistes » menacés en ces termes : « On va vous marcher dessus ... . Notre plan média, c’est de vous attaquer à mort ».Cela ne vous rappelle rien ? D’un passé pas très lointain ?!

Drôle de monde où l’on semble chercher à nous conduire ! Peut-être enfin que c’est bien celui-là le profil des peuples de demain et que c’est d’intelligence perverse que doivent se caractériser leurs nouveaux dirigeants ?!

Dans ce cas, les structures militant pour les droits de l’homme devraient réviser leur objet de façon à intégrer le droit à l’humiliation et à la flagellation par les parrains politiques. Il suffit de suivre la page face book intitulée « Nous sommes musulmans et fiers de voter Marine Le Pen », pour se convaincre des changements qui s’annoncent et dont les épisodes ci-dessus évoqués constituent les signes annonciateurs.

De ce point de vue au moins, la Tunisie de la transition démocratique serait bien dans le sens de la modernité.