Tunisie : La FIDH et le REMDH vivement inquiets de l'acharnement judiciaire et policier contre les jeunes


Le réseau euro-méditerranéen des droits de l’Homme (REMDH) et la Fédération internationale des ligues de droits de l’Homme (FIDH) ont exprimé leurs vives inquiétudes face à l’acharnement judiciaire et policier contre de nombreux jeunes et en particulier de jeunes activistes et militants en Tunisie, dans un communiqué conjoint rendu public ce vendredi 23 mai 2014.
Dans ce communiqué, les organisations ont appelé à la libération immédiate et l'arrêt des poursuites contre toute personne détenue arbitrairement, à la proportionnalité des procédures et des peines et ont rappelé aux autorités tunisiennes leur obligation de respecter la liberté d’expression, d’opinion et de rassemblement et d'œuvrer à l'indépendance de la justice.
Revenant sur l’arrestation d’Aziz Amami, les deux organisations ont souligné qu’il aurait été frappé pour l’obliger à signer le procès-verbal de son interrogatoire reconnaissant la détention de stupéfiant, chose qu’il a toujours nié.
« Le 21 mai 2014, le tribunal de première instance de Mahdia (agissant en tant que tribunal d’appel pour les jugements rendus par les juges cantonaux de son ressort) confirmait une condamnation de 8 mois de prison à l'encontre du blogueur Jabeur Mejri pour outrage à un fonctionnaire de justice. Jabeur avait été libéré en mars dernier après deux ans de prison pour la diffusion de dessins jugés blasphématoires. Gracié par le Président de la République tunisienne en février 2014, Jabeur a été placé en détention le 17 avril dernier pour avoir insulté le greffier d'un tribunal après un malentendu autour de la date d'une convocation devant le juge d'instruction. Il est également poursuivi dans le cadre d’une troisième affaire remontant à plusieurs années lorsque Jabeur travaillait au guichet d'une gare. Il est accusé de détournement d'environ 760 euros à la SNCFT », lit-on dans ce même communiqué.
Les organisations ont considéré, par ailleurs, que « la sévérité flagrante des mesures prises à l'encontre de ces deux personnes démontre que les faits qu'ils leur sont reprochés ne sont qu'un prétexte pour réprimer durement toute voix critique contre les autorités ou l'exercice de libertés fondamentales.
Par ailleurs, des jeunes de Regueb, Menzel Bouzayen, Meknassi, Ksibet Madiouni, Om Laarayès les frères de martyrs de la révolution, sont actuellement poursuivis ou jugés pour atteinte aux biens publics, atteinte à l’ordre public, ou agression de fonctionnaire, à nouveau en toute disproportion par rapport aux faits reprochés.
Plusieurs jeunes sont ainsi poursuivis au motif d’avoir participé aux événements ayant conduit à la fuite de Ben Ali et à la chute de son régime et d’avoir incendié, aux cours de ces événements, un certain nombre de poste de police, d’où le slogan de la campagne initiée par Azyz Amemi et plusieurs jeunes « moi aussi j’ai incendié un poste ». Des atteintes aux biens publics, à l’ordre public ou agression de fonctionnaire leur sont également reprochées.
Cet acharnement contraste singulièrement avec la réduction en appel en avril 2014 des peines prononcées contre des responsables de la répression du soulèvement populaire sous le régime de Ben Ali mais aussi avec l'impunité dont jouissent des auteurs de violences politiques perpétrées après la révolution par des groupes extrémistes et les ligues autoproclamées de « protection de la révolution ». Ainsi les agressions dont sont accusées ces « ligues » contre la centrale syndicale l’UGTT le 04 décembre 2012 à Tunis n'ont toujours pas été jugées.
Nos organisations expriment enfin leur vive inquiétude face à la répression et l’usage excessif de la force constatés à l’encontre des manifestants rassemblées le 18 mai 2014 pour dénoncer les arrestations arbitraires des jeunes de la révolution. Elles rappellent que la liberté de rassemblement et de manifestation pacifique est reconnue par les standards internationaux et la constitution tunisienne ».



