Une édifiante première semaine d’avril en Tunisie !
Par Mansour M’henni
La première semaine d’avril 2023 aura été, en Tunisie, une semaine d’hommages édifiants et de problèmes inquiétants, si bien qu’elle a suscité l’intérêt des responsables, des citoyens et des observateurs étrangers.
Il va sans dire que du côté problématique, en dehors du spectacle tragi-comique des chassés croisés politico-politiques, il y aurait à souligner, mais surtout à converser sereinement autour de la relation idoine à établir entre le pouvoir et les médias, au-delà de tout bras de fer ayant pour enjeu la domination de l’Autre et son asservissement. Les journalistes ont pour rôle principal d’informer les citoyens aussi objectivement que possible, car l’objectivité absolue n’existe pas, mais dans une liberté convenue avec les règles du vivre-ensemble et du respect de la dignité de chacun. Pour tout dire, il y a une morale sous-jacente à tout acte libre et il y a un langage approprié : cela est vrai aussi bien en matière d’information qu’en matière de communication politique. En cas de conflit majeur, une justice indépendante est censée tranchée dans le respect de l’éthique sociétale et de la déontologie professionnelle.
Il y aurait à s’attarder également sur la question socio-économique qui tend à devenir une maladie endémique d’un pays écartelé entre des prêts internationaux jugés trop accablants et chèrement payés et des scénarios d’indépendance économique, elle-même confortée par des offres séduisantes et non concrétisées. Ce tiraillement nous semble tributaire d’une vision aussi consensuelle que possible sur ce que la Tunisie entend par sa « démocratie », celle-ci étant devenue un vrai fourre-tout modulable à volonté. À la tête du client ! Dans cette vision serait bien délimitées les frontières de concepts comme dictature, autorité, et démocratie, avec une large communication sociétale permettant à la masse la plus étendue des citoyens de s’y exprimer afin de ne pas en faire des moutons de Panurge, exploitables à tout bout de champ par les manipulateurs du discours.
C’est peut-être devant ces dilemmes que le souvenir peut être d’un apport heureux et que certaines commémorations sont bénéfiques. Dans la première semaine d’avril, la mort d’Habib Bourguiba a été commémorée officiellement, sous l’égide de la présidence de la République, mais aussi par certains partis qui continuent de se reconnaître de l’esprit bourguibien ou au moins qui lui reconnaissent son mérite. Il faut dire qu’à chaque fois qu’on repense Bourguiba en tant que pensée et vision civilisationnelles, on s’enrichi intellectuellement et on est motivé par de nouvelles questions. Force est donc de saluer toutes les initiatives d’écrits et de rencontres autour de cette importante dynamique civilisationnelle car il y a de quoi éclairer l’avenir.
Deux jours après, le ministère de la Culture a organisé, dans la Cité de la Culture Chedly Klibi, la commémoration du 40ème jour du décès de feu Béchir Ben Slama. Là aussi, on n’a pas manqué de constater combien nous pouvons ignorer nos anciens responsables. Très souvent nous les clouons à un poteau d’accusation (qui peut se transformer en poteau d’exécution), et nous restons insensibles au côté éclairé de leur carrière ou de leur personnalité. En effet, certaines initiatives du défunt, surtout dans le secteur culturel, restent d’une vive actualité et d’une modernité certaine. Elles peuvent encore inspirer des intelligences prospectives.
Tout cela est exprimé ici en ces termes pour dire encore et toujours : en Tunisie, il y a de quoi maintenir et développer un état de société d’une ingéniosité séculaire. Il suffit pour cela que chacun sache s’inscrire dans son juste droit et se plier à son incontournable devoir, dans l’intérêt général de la Patrie et de ses enfants, en convenable relation avec le reste des pays et de leurs citoyens.
